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A Londres : les nouveaux atours sans charme de Cinderella

img_3549Londres. Royal Opera House. Cinderella (Ashton / Prokofiev). Nouvelle production 2023 (Tom Pye Décors/ Alexandra Byrne Costumes/ David Finn Lumières / Finn Ross Video designer) Représentation du dimanche 16 avril 2023.

C’était à première vue un jour peu judicieux pour faire un aller-retour à Londres afin de découvrir la nouvelle production du Royal Ballet de la Cinderella de Frederick Ashton. À Paris, le ballet était en effet projeté au cinéma à l’heure même où commençait la matinée qu’on avait réservée de longue date. Pourtant, les Parisiens n’ont pas vu une captation en direct de la représentation du 16 avril mais la diffusion de la distribution de la première réunissant Marianela Nunez et Vadim Muntagirov.

Le Royal Ballet n’aurait-il qu’un seul couple à promouvoir ? À ce rythme, les charmes réels et indéniables de la douce Marianela seront bientôt aussi érodés pour le public que le sourire de la Joconde pour les visiteurs du Louvre.

La production du ballet d’Ashton est « nouvelle » sans pour autant être particulièrement fraîche. Elle utilise beaucoup les projections lumineuses, comme cet effet boule à facettes dans la salle sur l’ouverture ou encore les fleurs qui se surimposent au décor pendant le passage des saisons à l’acte un. Néanmoins, on a vu des réalisations de ce type beaucoup plus élaborées et abouties par le passé au Royal Ballet. L’esthétique du premier acte reste souvent traditionnelle et sans imagination. Mis à part le joli costume de mendiante pour la fée marraine avec ses ailes entre chauve-souris et nervures de feuilles décomposées, rien n’atteint la grâce de la Cendrillon de David Bintley avec son style roccoco revu au prisme de Jules Barbier. La fée marraine, une fois « révélée » en tant que danseuse, est par exemple affligée d’une baguette magique à étoile électrifiée que ne renierait pas le gifte shoppe d’un parc d’attraction Disney. L’acte deux, situé dans les jardins d’un palais à la Chantilly est plus heureux ; les membres féminins du corps de ballet ont des costumes 1830 à la fois uniformes et différenciés par le truchement d’un ruban ou d’un détail de coiffure, mais on n’évite cependant pas la faute de goût avec les quatre solistes des Saisons fourrées dans des tutus aux couleurs atrocement criardes.

La ballet est typique du style Ashton. Il a abondamment recours au dumb show dans la tradition des pantomimes de Noël chère au cœur des Anglais. Pour cette reprise, le rôle des vilaines sœurs a été indifféremment attribué à des duos d’hommes (une tradition largement installée dans ce ballet depuis qu’Ashton lui-même, accompagné de Robert Helpman, en a endossé le rôle) ou de femmes. Nos « ugly sisters » (une mention qui a disparu du programme) pour la matinée étaient masculines. Bennet Gartside était parfait en dominatrix meneuse de revue à plumes et James Hay en demoiselle flirty cucul-la-praline qui oublie ses pas et écrase la moumoute de son partenaire de bal comme s’il s’agissait d’une bête nuisible. Mais le rôle du père, lui aussi dans la tradition de la pantomime dansée, nous a paru mal dessiné. Kevin Emerton paraissait trop jeune sous sa perruque blanche.

Hors ces rôles de caractère, la chorégraphie classique d’Ashton est simple, voire simpliste pour les jambes mais pas sans charme. Dans la captation de 1968, Antoinette Sibley y fait merveilles aux bras d’Antony Dowell, notamment lors de son arrivée au bal en simples piétinés sur pointes. Le génie d’Ashton repose en effet plus sur des accentuations des pas d’école et sur les épaulements que sur l’originalité des combinaisons chorégraphiques.

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Liam Boswell : le bouffon

Et c’est sans doute là que le bât blessait lors de cette matinée londonienne à laquelle nous avons assisté. Itziar Mendizabal, qui interprétait la fée marraine, a toujours été efficace et sèche. Mais en cette matinée, elle ne faisait pas particulièrement preuve d’autorité. On se souviendra donc plus de l’incarnation mimée de la fée mendiante, interprétée par la fine et subtile Olga Sadadoch, que de la marraine entutufiée de la suite du ballet. Des quatre saisons, seule Isabella Gasparini en Automne réunit toutes les qualités requises (caractérisation et technique). Ashley Dean possède la vélocité du Printemps mais ses pointes nous ont semblé un peu émoussées. L’Été de Mariko Sasaki confond l’alanguissement des bras de l’Eté avec les battements d’ailes désespérés de la mouette prisonnière d’un océan mazouté. Enfin, Gina Storm-Jensen, avec ses bras sans subtilité et son attaque agressive du plateau, évoque plus la congère que le flocon en fée Hiver. À l’acte deux, on a pu apprécier cependant la pureté de ligne et le ballon de Liam Boswell dans le rôle aussi bondissant que fastidieux du bouffon.

La Cendrillon de cette matinée, raison de ma traversée du Channel, Sarah Lamb, tire son épingle du jeu dans ce premier acte lesté par la laideur de la production et le manque de subtilité de la plupart des interprètes des parties dansées du ballet. Elle fait rire la salle lorsqu’elle elle imite ses sœurs dansant et rayonne enfin dans son carrosse-citrouille au milieu des Heures, douze filles du corps de ballet qui interprètent une chorégraphie mécanique imitant le mouvement d’une montre.

Mais c’est à l’acte deux que l’on peut vraiment apprécier les qualités de Lamb. La ballerine, d’une grande fraîcheur, fait rayonner les ports de bras et l’arabesque ashtonienne, en dessous des lignes de l’épaule et du dos pour un effet très Moira Shearer (la créatrice du rôle en 1945). Il y a chez Sarah Lamb une forme de réserve et de rayonnement diaphane qui crée une distance sans froideur, un mystère intrigant chez son personnage de souillon transfigurée. Son prince, Steven McRae, même si ses pieds ne sont plus aussi réactifs qu’ils ont pu l’être jadis, se pose en parfait contraste avec cette mystérieuse Cendrillon. Il a toutes les qualités du leading man, cette commande de la scène et cette flamboyance qui lui sont propres. Avec ce couple, les eaux chaudes et les eaux froides se rencontrent. Et l’histoire, à laquelle on était resté très extérieur jusqu’ici prend chair et cœur dès qu’ils dansent ensemble.

Au troisième acte, très raccourci par la coupure des recherches du prince dans les pays étrangers, Lamb en haillons continue à rayonner comme si elle portait encore sa robe de bal. Elle est d’ores et déjà l’élue. Ce que l’intrigue perd en suspens, elle le gagne en sérénité et en plénitude, à l’image du pas de deux final qui réunit les deux héros.

Les deux amants ont triomphé de l’adversité comme les deux danseurs ont surmonté eux cette production prosaïque et sans grâce.

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Sarah Lamb et Steven McRae. Cendrillon et son prince.

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Cinderella au Royal Ballet : trois pantoufles à mon pied

Yuhui Choe, l'Eté © Tristram Kenton

Yuhui Choe, l’Eté © Tristram Kenton

Le Royal Ballet reprend la Cinderella d’Ashton après une éclipse de plus de dix ans. Au début du spectacle, on se pince : « je ne me souvenais pas du tout de cet aspect-là ». Et pour cause : c’est une nouvelle production ! Les décors, les lumières et les costumes ont été repensés (respectivement par Tom Pye, David Finn et Alexandra Byrne). Certains éléments – l’entêtante musique de Prokofiev, la chorégraphie de Sir Frederick – sont immuables. D’autres, qu’on pourrait croire nouveaux, sont en fait un retour à une tradition perdue : le rôle des deux sœurs de Cendrillon, que je ne croyais dansé que par des hommes, est sur cette série également interprété par des femmes.

La nouvelle production réussit un joli équilibre entre le féérique et le comique : les tenues des sœurs font sourire tout en restant un poil en deçà du « too much », les robes des Saisons, dans des tons acidulés, sont joliment évocatrices. Dès le début, les spots éclairant la salle plantent une atmosphère que, par la suite, les projections vidéo (dues à Finn Ross) feront varier au fil de l’intrigue. Surtout, chaque transformation du décor – notamment le délabrement, préludant à sa disparition, de la maison du père de Cendrillon – est un enchantement à la fois visuel et émotionnel. Le seul bémol qu’on apporterait serait l’escalier un peu trop Broadway de la scène finale.

À l’origine, j’avais prévu de ne voir que deux distributions : celle réunissant Yasmine Naghdi et Matthew Ball (remplaçant Cesar Corrales, 29 mars), puis Francesca Hayward et Alexander Campbell (30 mars). Il eut été trop bête, puisque j’étais encore sur place, de rater la matinée avec Marianela Nuñez et Vadim Muntagirov, le duo-vedette du Royal Ballet à l’heure actuelle (1er avril).

Un effet secondaire de cette triplette est que les coups d’archet de la valse trottent dans votre tête pendant une bonne semaine. En revanche, aucun sentiment de lassitude ne se développe au fil du parcours.

Est-ce à porter au crédit de la musique, de la chorégraphie, de la production ou de l’interprétation ? De leur combinaison réussie, sans doute. En tout cas, chaque ballerine apporte sa touche au personnage de Cendrillon : Mlle Naghdi à travers la précision ciselée de sa danse ; Mlle Hayward via une espiègle vivacité de mouvement ; et Mlle Nuñez par le moelleux de l’attaque, avec des montées et descentes de pointes délicieuses de douceur. Dans un rôle qui requiert moins la prouesse technique que le charme de la caractérisation, les trois danseuses sont quasiment à parité. Il en va presque de même pour les trois Princes (avec un petit avantage de prestance pour Vadream).

Yasmine Naghdi, Photo Tristram Kenton, courtesy of ROH

Yasmine Naghdi, Photo Tristram Kenton, courtesy of ROH

Les trois couples racontent aussi la rencontre de l’âme-sœur, mais avec des accents légèrement différents : pour Naghdi-Ball comme pour Hayward-Campbell, c’est une découverte enchantée qui les révèle à eux-mêmes. Chacun de leur côté, Mlle Nuñez et damoiseau Muntagirov caractérisent adéquatement leur personnage, mais leur partenariat dégage tout de suite un tel sentiment de maîtrise que leur transformation à la fin du conte de fées est un tantinet moins marquée.

Le plaisir sans mélange qu’on éprouve à voir et revoir cette Cinderella tient, aussi, à l’attrait des autres rôles solistes ou semi-solistes. Dans sa composition actuelle, la compagnie a moins de mal à rassembler un pack de ballerines satisfaisant pour la Fée-marraine et les Saisons que ce n’est le cas pour l’ensemble des rôles de fée de Sleeping Beauty. Cependant, ce n’est pas tous les soirs l’extase (avec une notable baisse de régime le 30 mars).

Vadim Muntagirov et Marianela Nunez, photo Tristram Kenton

Vadim Muntagirov et Marianela Nunez, photo Tristram Kenton

Si l’on ne cite que les prestations marquantes, il faut d’abord saluer Yuhui Choe, qui dansait le rôle-titre il y a plus d’une décennie, mais n’a pas été promue Principal à temps, comme on aurait cru. En Été, elle danse languide de sueur (29 mars, on croit voir les gouttes perler de son visage) et en Automne, se fait coupante comme le vent (1er avril). Ashley Dean (29), Sae Maeda (30) et Anna Rose O’Sullivan (1er) incarnent délicatement le Printemps. Pour l’hiver, la palme de la présence glaçante revient à Mayara Magri (1er avril).

Cette dernière apporte aussi une rondeur enveloppante et maternelle au rôle de la Fée-marraine (29). Par contraste, Annette Buvoli (30) et Fumi Kaneko (1er), plus altières, font l’effet de grandes dames par hasard pourvues d’une baguette magique. Dans le rôle du Fou, Liam Boswell (30) et Taisuke Nakao (1er) convainquent davantage que Joonhyuk Jun (29), dont les bras et l’emballement paraissent plus mécaniques qu’organiques.

Et puis il y a la prestation des deux demi-sœurs de Cendrillon. Le duo est aussi comique que chorégraphique, et requiert des trésors de coordination, aussi bien dans les mimiques que dans les figures. La pantomime ayant été allégée de ses aspects les plus camp, les interprètes trouvent facilement le bon équilibre : on n’attendait pas Luca Acri (petite sœur timide) et Thomas Whitehead (grande sœur exubérante) dans le rôle, et pourtant ils sont hilarants (29). De même pour Christina Arestis (l’écrasante) et Kristen McNally (l’écrasée), qui ont à la fois une tête – ça aide à la caractérisation sous perruque enlaidissante et chapeau envahissant – et un solide sens comique (30 mars). Mais le premier avril, c’est Gary Avis qui vole résolument la vedette à son acolyte (toujours Luca Acri), avec des inventions et des ajouts à la drôlerie inénarrable, jusqu’au rideau final.

Gary Avis et Luca Acri, photo Tristram Kenton, courtesy of ROH

Gary Avis et Luca Acri, photo Tristram Kenton, courtesy of ROH

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Pas de deux at the Paris Opera Ballet : Baby Can YOU drive my car?

The extended apron thrust forward across where the orchestra should have been gave many seats at the Palais Garnier – already not renowned for visibility — scant sightlines unless you were in a last row and could stand up and tilt forward. Were these two “it’s a gala/not a gala” programs worth attending? Yes and/or no.

Evening  Number One: “Nureyev” on Thursday, October 8, at the Palais Garnier.

Nureyev’s re-thinkings of the relationship between male and female dancers always seek to tweak the format of the male partner up and out from glorified crane operator into that of race car driver. But that foot on the gas was always revved up by a strong narrative context.

Nutcracker pas de deux Acts One and Two

Gilbert generously offers everything to a partner and the audience, from her agile eyes through her ever-in-motion and vibrantly tensile body. A street dancer would say “the girlfriend just kills it.” Her boyfriend for this series, Paul Marque, first needs to learn how to live.

At the apex of the Act II pas of Nuts, Nureyev inserts a fiendishly complex and accelerating airborne figure that twice ends in a fish dive, of course timed to heighten a typically overboard Tchaikovsky crescendo. Try to imagine this: the stunt driver is basically trying to keep hold of the wheel of a Lamborghini with a mind of its own that suddenly goes from 0 to 100, has decided to flip while doing a U-turn, and expects to land safe and sound and camera-ready in the branches of that tree just dangling over the cliff.  This must, of course, be meticulously rehearsed even more than usual, as it can become a real hot mess with arms, legs, necks, and tutu all in getting in the way.  But it’s so worth the risk and, even when a couple messes up, this thing can give you “wow” shivers of delight and relief. After “a-one-a-two-a-three,” Marque twice parked Gilbert’s race car as if she were a vintage Trabant. Seriously: the combination became unwieldy and dull.

Marque continues to present everything so carefully and so nicely: he just hasn’t shaken off that “I was the best student in the class “ vibe. But where is the urge to rev up?  Smiling nicely just doesn’t do it, nor does merely getting a partner around from left to right. He needs to work on developing a more authoritative stage presence, or at least a less impersonal one.

 

Cendrillon

A ballerina radiating just as much oomph and chic and and warmth as Dorothée Gilbert, Alice Renavand grooved and spun wheelies just like the glowing Hollywood starlet of Nureyev’s cinematic imagination.  If Renavand “owned” the stage, it was also because she was perfectly in synch with a carefree and confident Florian Magnenet, so in the moment that he managed to make you forget those horrible gold lamé pants.

 

Swan Lake, Act 1

Gently furling his ductile fingers in order to clasp the wrists of the rare bird that continued to astonish him, Audric Bezard also (once again) demonstrated that partnering can be so much more than “just stand around and be ready to lift the ballerina into position, OK?” Here we had what a pas is supposed to be about: a dialogue so intense that it transcends metaphor.

You always feel the synergy between Bezard and Amandine Albisson. Twice she threw herself into the overhead lift that resembles a back-flip caught mid-flight. Bezard knows that this partner never “strikes a pose” but instead fills out the legato, always continuing to extend some part her movements beyond the last drop of a phrase. His choice to keep her in movement up there, her front leg dangerously tilting further and further over by miniscule degrees, transformed this lift – too often a “hoist and hold” more suited to pairs skating – into a poetic and sincere image of utter abandon and trust. The audience held its breath for the right reason.

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Manfred

Bewildered, the audience nevertheless applauded wildly at the end of this agonized and out of context solo. Pretending to themselves they had understood, the audience just went with the flow of the seasoned dancer-actor. Mathias Heymann gave the moment its full dose of “ah me” angst and defied the limits of the little apron stage [these are people used to eating up space the size of a football field].

Pas de deux can mostly easily be pulled out of context and presented as is, since the theme generally gravitates from “we two are now falling in love,” and “yes, we are still in love,” to “hey, guys, welcome to our wedding!” But I have doubts about the point of plunging both actor and audience into an excerpt that lacks a shared back-story. Maybe you could ask Juliet to do the death scene a capella. Who doesn’t know the “why” of that one? But have most of us ever actually read Lord Byron, much less ever heard of this Manfred? The program notes that the hero is about to be reunited by Death [spelled with a capital “D”] with his beloved Astarté. Good to know.

Don Q

Francesco Mura somehow manages to bounce and spring from a tiny unforced plié, as if he just changed his mind about where to go. But sometimes the small preparation serves him less well. Valentine Colasante is now in a happy and confident mind-set, having learned to trust her body. She now relaxes into all the curves with unforced charm and easy wit.

R & J versus Sleeping Beauty’s Act III

In the Balcony Scene with Miriam Ould-Braham, Germain Louvet’s still boyish persona perfectly suited his Juliet’s relaxed and radiant girlishness. But then, when confronted by Léonore Baulac’s  Beauty, Louvet once again began to seem too young and coltish. It must hard make a connection with a ballerina who persists in exteriorizing, in offering up sharply-outlined girliness. You can grin hard, or you can simply smile.  Nothing is at all wrong with Baulac’s steely technique. If she could just trust herself enough to let a little bit of the air out of her tires…She drives fast but never stops to take a look at the landscape.

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As the Beatles once sang a very, very, long time ago:

 « Baby, you can drive my car
Yes, I’m gonna be a star
Baby you can drive my car
And maybe I’ll love you »

Evening Two: “Etoiles.”  Tuesday, October 13, 2020.

We were enticed back to the Palais Garnier for a thing called “Etoiles {Stars] de l’Opera,” where the program consisted of…anything and everything in a very random way.  (Plus a bit of live music!)

Clair de lune by Alistair Marriott (2017) was announced in the program as a nice new thing. Nice live Debussy happened, because the house pianist Elena Bonnay, just like the best of dancers, makes all music fill out an otherwise empty space.

Mathieu Ganio, sporting a very pretty maxi-skort, opened his arms sculpturally, did a few perfect plies à la seconde, and proffered up a few light contractions. At the end, all I could think of was Greta Garbo’s reaction to her first kiss in the film Ninochka: “That was…restful.”  Therefore:

Trois Gnossiennes, by Hans van Manen and way back from 1982, seemed less dated by comparison.  The same plié à la seconde, a few innie contractions, a flexed foot timed to a piano chord for no reason whatever, again. Same old, eh? Oddly, though, van Manen’s pure and pensive duet suited  Ludmila Paglerio and Hugo Marchand as  prettily as Marriott’s had for Ganio. While Satie’s music breathes at the same spaced-out rhythm as Debussy’s, it remains more ticklish. Noodling around in an  absinth-colored but lucid haze, this oddball composer also knew where he was going. I thought of this restrained little pas de deux as perhaps “Balanchine’s Apollo checks out a fourth muse.”  Euterpe would be my choice. But why not Urania?

And why wasn’t a bit of Kylian included in this program? After all, Kylain has historically been vastly more represented in the Paris Opera Ballet’s repertoire than van Manen will ever be.

The last time I saw Martha Graham’s Lamentation, Miriam Kamionka — parked into a side corridor of the Palais Garnier — was really doing it deep and then doing it over and over again unto exhaustion during  yet another one of those Boris Charmatz events. Before that stunt, maybe I had seen the solo performed here by Fanny Gaida during the ‘90’s. When Sae-Un Park, utterly lacking any connection to her solar plexus, had finished demonstrating how hard it is to pull just one tissue out of a Kleenex box while pretending it matters, the audience around me couldn’t even tell when it was over and waited politely for the lights to go off  and hence applaud. This took 3.5 minutes from start to end, according to the program.

Then came the duet from William Forsythe’s Herman Schmerman, another thingy that maybe also had entered into the repertoire around 2017. Again: why this one, when so many juicy Forsythes already belong to us in Paris? At first I did not remember that this particular Forsythe invention was in fact a delicious parody of “Agon.” It took time for Hannah O’Neill to get revved up and to finally start pushing back against Vincent Chaillet. Ah, Vincent Chaillet, forceful, weightier, and much more cheerfully nasty and all-out than I’d seen him for quite a while, relaxed into every combination with wry humor and real groundedness. He kept teasing O’Neill: who is leading, eh? Eh?! Yo! Yow! Get on up, girl!

I think that for many of us, the brilliant Ida Nevasayneva of the Trocks (or another Trock! Peace be with you, gals) kinda killed being ever to watch La Mort du cygne/Dying Swan without desperately wanting to giggle at even the idea of a costume decked with feathers or that inevitable flappy arm stuff. Despite my firm desire to resist, Ludmila Pagliero’s soft, distilled, un-hysterical and deeply dignified interpretation reconciled me to this usually overcooked solo.  No gymnastic rippling arms à la Plisetskaya, no tedious Russian soul à la Ulanova.  Here we finally saw a really quietly sad, therefore gut-wrenching, Lamentation. Pagliero’s approach helped me understand just how carefully Michael Fokine had listened to our human need for the aching sound of a cello [Ophélie Gaillard, yes!] or a viola, or a harp  — a penchant that Saint-Saens had shared with Tchaikovsky. How perfectly – if done simply and wisely by just trusting the steps and the Petipa vibe, as Pagliero did – this mini-epic could offer a much less bombastic ending to Swan Lake.

Suite of Dances brought Ophélie Gaillard’s cello back up downstage for a face to face with Hugo Marchand in one of those “just you and me and the music” escapades that Jerome Robbins had imagined a long time before a “platform” meant anything less than a stage’s wooden floor.  I admit I had preferred the mysterious longing Mathias Heymann had brought to the solo back in 2018 — especially to the largo movement. Tonight, this honestly jolly interpretation, infused with a burst of “why not?” energy, pulled me into Marchand’s space and mindset. Here was a guy up there on stage daring to tease you, me, and oh yes the cellist with equally wry amusement, just as Baryshnikov once had dared.  All those little jaunty summersaults turn out to look even cuter and sillier on a tall guy. The cocky Fancy Free sailor struts in part four were tossed off in just the right way: I am and am so not your alpha male, but if you believe anything I’m sayin’, we’re good to go.

The evening wound down with a homeopathic dose of Romantic frou-frou, as we were forced to watch one of those “We are so in love. Yes, we are still in love” out of context pas de deux, This one was extracted from John Neumeier’s La Dame aux Camélias.

An ardent Mathieu Ganio found himself facing a Laura Hecquet devoted to smoothing down her fluffy costume and stiff hair. When Neumeier’s pas was going all horizontal and swoony, Ganio gamely kept replacing her gently onto her pointes as if she deserved valet parking.  But unlike, say, Anna Karina leaning dangerously out of her car to kiss Belmondo full throttle in Pierrot le Fou, Hecquet simply refused to hoist herself even one millimeter out of her seat for the really big lifts. She was dead weight, and I wanted to scream. Unlike almost any dancer I have ever seen, Hecquet still persists in not helping her co-driver. She insists on being hoisted and hauled around like a barrel. Partnering should never be about driving the wrong way down a one-way street.

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Un argument pour « Cendrillon » de Rudolf Noureev

A Paris, à l’Opéra Bastille, du 26 novembre 2018 au 2 janvier 2019. 

Musique de Serge Prokofiev. Chorégraphie de Rudolf Noureev.

Serge Prokofiev a composé Cendrillon durant la Deuxième guerre mondiale pour Galina Oulanova, alors au Bolshoï de Moscou. La partition parvient à faire ressortir toute la douceur, l’ironie, et même les aspects les plus violents du conte de fée classique transcrit à l’origine par Charles Perrault dans son chef-d’œuvre de 1697, Histoires du temps passé.

En 1986, le directeur de la danse du ballet de l’opéra de Paris, Rudolf Noureev à l’époque, décida de créer un véhicule pour la plus jeune étoile de la compagnie, la si talentueuse Sylvie Guillem. Inspiré par leur mutuelle adoration des grands classiques du cinéma hollywoodien, le résultat est une Cendrillon décalée. Actualisant le « jadis, dans un pays lointain », le ballet rend hommage à l’ère des films muets et des premières comédies musicales du grand écran : le monde de Charlie Chaplin et de Fred Astaire.

ACTE UN (45 minutes)

Scène 1 : dans la maison de Cendrillon, Los Angeles, quelque part durant l’âge d’Or hollywoodien.

La belle mère et les deux sœurs par alliance de Cendrillon, méchantes et dépourvues de talent, se disputent, cousent et se disputent encore sous le regard de la pauvre fille. Lorsqu’elle se retrouve seule pour un moment, Cendrillon se permet des rêves d’étoile… ou, au moins, que son père cesse d’abuser de la bouteille. Sorti de nulle part, un mystérieux inconnu qui semble avoir été victime d’un accident routier s’effondre dans leur living room. Cendrillon est la seule qui tente de l’aider.

Contre toute attente, les demi-sœurs ont décoché de petits rôles dans un film musical dans la veine Busby Berkeley : des costumes sont livrés et le chorégraphe vient essayer de mettre les filles au point. Quand tous sont partis pour les studios, Cendrillon cesse d’astiquer le sol et s’amuse à imiter les nombreuses stars qu’elle a vues au cinéma.

À son grand étonnement, le mystérieux inconnu revient et lui révèle qu’il est un célèbre producteur de cinéma. L’emportant dans sa cape comme une fée-marraine, il l’emmène jusque dans ses studios.

Scène 2 : les studios d’Hollywood

Parce que Cendrillon doit choisir une robe pour ses débuts filmés, une flopée de danseurs virevolte dans les costumes de mode d’une collection printemps-été-automne-hiver (par la désormais légendaire Hanae Mori). Tandis que Cendrillon et le producteur regardent, ce passage se développe en un interlude dansé dans la veine des premiers films musicaux des années 30. Incorrigible, le producteur ne peut s’empêcher de s’y inviter pour une imitation de Groucho Marx (notez que Noureev a créé ce rôle sur lui-même). Mais avant qu’elle puisse prendre la route au coucher du soleil, le producteur avertit Cendrillon à propos de Minuit (douze danseurs dans d’affreux costumes qui titubent comme des créatures de Frankenstein). Quand l’horloge aura sonné son douzième coup, elle ne perdra pas que sa robe de bal et toute sa carrosserie. Les danseurs tic-taqueurs appuient sur un message bien plus amer : si notre héroïne ne se prend pas en main pour utiliser pleinement sa jeunesse, sa beauté et son talent dans les prochaines heures, elle ne vaudra pas mieux qu’une morte.

 

ENTRACTE (20 minutes)

ACTE DEUX (45 minutes)

Scène 1 : salles de tournage

Tandis que le chef de plateau et son assistant se querellent, trois films muets sont frénétiquement tournés, pour le meilleur comme pour le pire.

Scène 2 : le grand plateau

L’acteur vedette (le prince charmant), empaqueté dans du satin lamé-doré, fait sa grande entrée. Mais quand la répétition débute, il est consterné de se retrouver constamment tripoté par trois femmes absolument bizarres : les demi-sœurs et la belle-mère de Cendrillon. Bien que découragé, le chorégraphe ordonne le début des répétitions. C’est alors que, sous le regard attentif du producteur, Cendrillon fait sa grande entrée en grand ralenti cinématographique, et se révèle, dans ses screen-tests, être Ginger Rogers, Rita Hayworth et Cyd Charisse incarnées dans la même femme.

Durant la pause, un groupe d’aspirantes actrices « serveuse pour le moment » – et parées de coquets costumes de bonne – chaloupent et servent des oranges [Plaisanterie musicale : on entend une reprise de la célèbre marche de Prokofiev pour son opéra de 1919, « L’Amour des trois oranges »]. Les deux sœurs maquignonnent dans leur coin avec un des fruits afin d’attirer l’attention de la star. Mais la vedette n’a d’yeux que pour Cendrillon, et rien ne pourrait troubler le bonheur de cet adorable couple n’était le tic tac de l’horloge sonnant les douze coups de minuit.

 

ENTRACTE (20 minutes)

ACTE TROIS (40 minutes)

Scène 1 : Los Angeles

L’acteur vedette, au désespoir de retrouver Cendrillon, entraîne toute la distribution masculine et l’équipe technique dans une battue. Tels des cowboys, les gars galopent dans tous les sens pour retrouver la fille à son pied. Ils échouent dans une série de bars-clichés hollywoodiens. a) Un palais du tango/fandango/flamenco (La sœur moche #1). b) Un bar à opium chinois (la sœur moche #2). c) Un cabaret russe (la très énergique belle-mère). Mais leurs efforts ne sont pas couronnés de succès.

 

Scène 2 : retour à la maison

Cendrillon, désespérée, effrayée par la célébrité mais en même temps lasse de sa vie actuelle, se demande si le jour passé n’a pas juste été qu’un rêve. Mais son cauchemar éveillé s’achève quand la star de cinéma arrive. Bien entendu, la chaussure est à son pied. Mais avant de pouvoir danser avec son prince, elle doit signer le contrat d’exclusivité avec le studio que le producteur agite sous ses yeux. Mais peut-être la servitude à un studio vaut-elle mieux que la servitude à une belle famille ? À la fin, ce qui importe vraiment c’est que le prince charmant danse divinement. Non ?

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A plot summary for Cendrillon (a.k.a. The ballet about Cinderella)

In Paris at the Opéra Bastille from November 26th, 2018, through January 2nd, 2019.
Music by Sergei Prokofiev
Choreography by Rudolf Nureyev

Sergei Prokofiev composed Cinderella during the Second World War for Galina Ulanova, then at Moscow’s Bolshoi Ballet. The musical score manages to bring out all the sweet, ironic, and even quite violent aspects of the classic fairy tale as originally transcribed by Charles Perrault in his 1697 masterpiece The Mother Goose Tales.
In 1986, the Paris Opera Ballet’s then director, Rudolf Nureyev, decided to create a vehicle for the company’s youngest and so talented ballerina, Sylvie Guillem. Inspired by their mutual adoration of classic Hollywood movies, the result is Cinderella with a twist. Updated from “long ago and far away,” the ballet pays homage to the era of silents and early Silver Screen musicals: the world of Charlie Chaplin and Fred Astaire.

ACT ONE (45 minutes)

Scene one: at Cinderella’s house, Los Angeles, sometime during Hollywood’s golden age.

Cinderella’s Stepmother and the two evil and untalented stepsisters argue, sew away furiously, and argue again as the poor girl looks on. When she finds herself alone for a moment, Cinderella allows herself to dream of stardom…or at least that her father stop drinking. Out of the blue, a mysterious stranger — who seems to have crashed some kind of vehicle outside — plops down in their living room. Cinderella is the only one who tries to help him.
Amazingly, the stepsisters have finally won bit parts in a Busby Berkeley-ish musical: costumes are delivered and the Choreographer shows up to try to put the girls through their paces. Once all are off to the studio, Cinderella stops scrubbing the floor and plays at being the many stars she’s seen at the cinema. To her astonishment, the stranger returns and reveals that he is in fact a famous Hollywood Producer. Sweeping her up into his cape like a fairy godfather, he whisks her off to his studio.

Scene two: at a Hollywood studio

Because Cinderella must chose a gown for her screen debut, a bevy of dancers swirl about in a display of couture outfits designed for spring, summer, fall, and winter by the now legendary Japanese designer Hanae Mori. As Cinderella and the Producer look on, this interlude develops into a full-scale number in the spirit of the RKO musicals. Irrepressible, the Producer butts in to the proceedings with a Groucho Marx impersonation. (Note: Nureyev created this role for himself). But before she can ride off into the sunset, the producer warns Cinderella about Midnight (twelve dancers in awful costumes who lurch around like Frankenstein’s monster). Once the clock strikes twelve, she will lose not only her gown and carriage. The tick-tocking dancers insist upon a much more bitter message through their movement: if our heroine does not take charge and use her youth, beauty, and talent to their fullest during the next few hours, she would be better off dead.

INTERMISSION (20 minutes)

ACT TWO (45 minutes)

Scene one: On the sound stages

As the unit director and his assistant quarrel, three silent films are being frantically made to better or worse effect.

Scene two: The Main Soundstage

The Movie Star (Prince Charming), carefully packaged in gold lamé, makes his grand entrance. But when rehearsals begin, he is appalled to find himself repeatedly pawed at by three deeply weird women: Cinderella’s stepsisters and that Stepmother. Nevertheless, the discouraged choreographer insists that rehearsals must begin. Then, under the Producer’s watchful eye, Cinderella makes an even grander entrance in slo-mo and proves, in her screen test, to be Ginger Rogers, Rita Hayworth, and Cyd Charisse all rolled into one.
During a break, a bevy of wannabe actresses “only waitressing for the moment” – and decked out in “sexy French maid” costumes — slink around and serve up oranges [musical joke: we hear the a reprise of the famous march from Prokofiev’s 1919 opera, “A Love for Three Oranges.”] The two sisters fiddle around with their fruit, hoping to redirect the star’s attention. But The Movie Star only has eyes for Cinderella, and nothing would mar the adorable couple’s happiness, were it not for the tick-tock of the chimes of midnight…

INTERMISSION (20 minutes)

ACT THREE (40 minutes)

Scene one: Los Angeles

The Movie Star, desperate to find his Cinderella, enlists all the male cast and crew in a search party. Like cowboys, the boys gallop off and try to find the girl who fits the shoe. They end up checking out the women at a series of Hollywood cliché locales: a) a tango/fandango/flamenco palace [Ugly Sister #1] b) a Chinese opium den [Ugly Sister #2] c) a Russian cabaret [the very perked-up Stepmother]. But their efforts are to no avail.

Scene two: back at the house

Cinderella, miserable, afraid of stardom yet so wearied of her present life, wonders if the last day had not been just a dream. But her living nightmare ends when the Movie Star arrives. Of course the shoe fits. But before she can dance off with her prince, she must sign the studio contract that the Producer waves before her eyes. Perhaps servitude to a studio is better than servitude to a stepfamily? In the end, all that really matters is that a prince charming loves you and dances divinely. Right?

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