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Programme « Racines » à l’Opéra : la forme et les formules

A l’Opéra de Paris, le programme Racines concocté par José Martinez se proposait de présenter trois ballets écrits pour la technique des pointes. L’an dernier, Sharon Eyal, qui devait créer avec cet accessoire central du ballet classique féminin, avait reculé devant l’obstacle. Ici, les trois œuvres répondaient donc bien au cahier des charges. La soirée proposait une reprise et deux entrées au répertoire : Thème et Variations s’y trouve depuis 1993. Corybantic Games de Christopher Wheeldon a été créé par le Royal Ballet en 2018 et Rhapsodies, par le chorégraphe Sud-africain Mthuthuzeli, est une très récente création pour le Ballet de Zurich, en 2024.

Le programme était bien pensé sur le papier. Qu’allait-il en être sur scène ?

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Theme & Variations.

La soirée s’ouvrait sur un des chef-d’œuvres du ballet néoclassique : Thème et Variations créé par George Balanchine en 1941 à l’American Ballet Theatre pour Alicia Alonso et Igor Youskevitch. L’eouvre appartient à la veine des ballets néo-pétersbourgeois du chorégraphe russe qui, au début du XXe siècle, avait participé aux derniers feux des ballets impériaux en exécutant des rôles d’enfant dans les grands ballets du tout juste défunt Petipa, notamment La Belle au bois dormant. Thème et Variations est d’ailleurs, comme d’autres ballets de Balanchine (Ballet Impérial, 1941, ou Diamants, 1967) une reconstruction amoureuse du ballet des ballets. Les théories des huit danseuses qui entrent en piétinés, main dans la main et servent de guirlande décorative aux développés équilibres de la ballerine, sont une citation assumée du septuor des fées du prologue. Les variations, extrêmement véloces, de la soliste de Thème ne sont pas sans rappeler les évolutions d’une fée Fleur de farine, Canari ou Violente. Les variations du soliste masculin reprennent en le condensant le répertoire de pas des rares variations de prince de La Belle. Le grand ballabile qui clôt le ballet est typique de la manière de Petipa.

Après une double et longue série de Belle au bois dormant la saison dernière, le ballet de l’Opéra s’est montré, les trois soirs où nous avons vu le ballet, tolérablement à la hauteur de sa réputation. Les demoiselles (en tutu bleu roi) étaient fort disciplinées tandis que les damoiseaux ont pu à l’occasion s’agenouiller en ligne sinusoïdale après leur grand jeté en tournant. Du quatuor de demi-solistes féminines, en bleu-layette, on aura préféré celui de la soirée du 7 novembre qui comptait dans ses rangs Claire Teisseyre et Nine Seropian. Les développés sur pointe avaient un petit côté jazzy qui rendait particulièrement hommage au style du plus américain des chorégraphes russes.

Les fortunes sont diverses chez les étoiles mais jamais inintéressantes. Le 18 octobre, Valentine Colasante se montre élégante : un joli travail des mains sans affectation et des épaulements bien dessinés. En revanche, elle finit sa première variation rapide bien avant l’orchestre, manquant donc son effet. Paul Marque  a un beau ballon. Ses jetés rebondis en attitude ou ses temps levés double ronds de jambe piqué arabesque sont parfaits. Pourtant, son aura de Leading man est en berne. C’est d’autant plus dommage que partenariat est fluide avec une pointe charnelle ajoutée par Colasante. Musicalement, ce passage n’est pas aidé par l’orchestre, le solo du premier violon est languissant sans être émouvant et l’orchestre, sous la baguette plan-plan du sempiternel Velö Pahn, joue les sédatifs. Ce défaut musical ne s’améliorera pas hélas avec les deux distributions suivantes.

Valentine Colasante et Paul Marque. Thèmes et Variations. 18/10/2025

Le 6 novembre, Roxane Stojanov interprétait le rôle de l’Etoile. La dernière nommée de l’Opéra a de jolies lignes et un joli phrasé. Ses gargouillades sur la première variation sont bien dessinées quand elles n’était pas le point fort de Colasante. Malheureusement elle manque successivement les pirouettes finales de ses deux variations, ternissant un tableau sans cela fort positif. On retient donc davantage son partenaire, Lorenzo Lelli, qui maitrise parfaitement sa partition et déploie le charisme qui manquait tant à Paul Marque. Lelli a un beau temps de saut. Il danse avec beaucoup de doigts, montrant que son mouvement va jusqu’aux extrémités du corps. L’arabesque en revanche pourrait s’allonger encore un peu, s’apparentant plus pour le moment à une attitude.

Le jour suivant on est enfin inconditionnellement conquis. Les premiers danseurs Inès McIntosh et Francesco Mura menaient avec maestria le corps de ballet. McIntosh, le bas de jambe ciselé, s’envole littéralement durant les gargouillades de la première variation. Ses épaulements à la fois précis et déliés séduisent car ils indiquent précisément des directions dans l’espace qui sortent du cadre pourtant large de la scène. Sa vitesse d’exécution dans les pirouettes ébaubit.

Francesco Mura, compact et explosif dans les sauts, la présence solaire, n’est pas sans évoquer Edward Villela, un grand interprète du rôle dans les années 70. Dans la série des doubles ronds de jambe les arabesques en piqué sont claires comme le cristal.

Dans l’adage, McIntosh à une qualité de distance-présence, très Farrellienne, qui nous donne envie de la voir dans le mystérieux et intime pas de deux de Diamants. Dans le Final pyrotechnique, le couple McIntosh-Mura peaufine l’arrêté-enchainé : les positions arabesques sont soulignées sans que jamais le flot du mouvement ne soit interrompu. Un bonheur !

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Rhapsodies.

La deuxième pièce, Rhapsodies, nous permet de découvrir un chorégraphe sud-africain inconnu de nous, Mthuthuzeli November. Le jeune chorégraphe, actif depuis le milieu des années 2010, propose une chorégraphie sur la célébrissime Rhapsody in Blue de Georges Guershwin pour piano et orchestre. La pièce, créée à Zurich en 2024, bénéficie d’une scénographie soignée de Magda Willi. Au début du ballet, une grande et profonde porte carrée éclairée en leds trône au centre de la scène. Actionnée par les danseurs, elle se difracte ensuite en plusieurs ouvertures qui redéfinissent l’espace et créent des effets-miroir assez malins. Déployées en forme de fleur, posées en arc de cercle, ces ouvertures sont surmontées d’un luminaire central (l’ex-cadre de la porte initiale), similaire à ceux qu’on trouverait dans une salle de billard mais qui aurait été repensé par un designer danois des sixties.

Rhapsodies de Mthuthuzeli November. Letizia Galloni et Yvon Demol

La gestuelle utilise d’amples ports de bras qui semblent entraîner les grands développés des jambes. La spirale est à l’honneur. Il y a des passages à genoux. Un premier couple ouvre le ballet, observé par un troisième larron avant que l’ensemble des danseurs, portant des costumes du quotidien à peine retouchés, n’apparaissent. Le 17 octobre et le 7 novembre, Letizia Galloni séduit par son énergie d’élastique tendu, prêt à vous claquer à la figure. Elle danse aux côtés d’Yvon Demol intense et athlétique. Le 6 novembre, Hohyun Kang fait montre d’une sinuosité plus végétale et exsude un parfum de sensualité qu’on aurait aimé trouver dans sa Myrtha, un tantinet monolithique, sur la scène de Garnier. Pablo Legasa, quant à lui, concurrence sa partenaire sur le terrain de la liane douée de vie. Sa souplesse, qui ferait pâlir d’envie une danseuse, est magnifiée par la force de son partenariat. Les oppositions et tensions du duo créent un phrasé palpitant.

Hohyun Kan et Pablo Legasa dans Rhapsodies de Mthuthuzeli November

Néanmoins, avec ces deux couples intéressants à leur manière, on reste un peu à l’extérieur. Tout d’abord, on ne comprend pas quelle histoire ils racontent. Leur connexion avec le corps de ballet qu’ils rejoignent entre deux passages solistes, reste obscure. Et on finit par se lasser de cette chorégraphie qui emploie tout le répertoire du classique sexy à l’américaine utilisé maintes fois à Broadway. La musicalité est calquée sur la musique : les mouvements de groupe se font sur les tutti d’orchestre et la phrase musicale semble paraphrasée. A l’occasion, certains mouvements tonitruants sont comiques. L’entrée des filles en piétinés sur pointe avec bras mécaniques ou le final où les garçons rejoignent les filles pour des piétinés sur demi-pointe n’est pas sans évoquer, l’humour en moins, la scène des papillons du concert de Robbins.

C’est plaisant, ça bouge, mais on a une impression de déjà-vu. Le programme annonçait que dans Rhapsodies, Nthuthuzeli November mêlait la danse de rue qu’il pratiquait enfant en Afrique du Sud et l’héritage de la danse classique. De rue, je n’ai décelé que la 42eme.

Ceci pose la question de l’intitulé de la soirée. Je pensais naïvement au début que Racines faisait référence au point commun de ces trois ballets : l’usage des pointes. Mais il semblerait que les racines en question étaient culturelles : la Russie pour Balanchine –connexion évidente dans Thème et Variations-, l’Afrique du Sud pour November –qu’on n’a pas été capable de déceler- et … la Grèce pour Christopher Wheeldon ?

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Corybantic Games.

C’est peut-être aller cherchez un peu loin les « Racines ». Certes, toute la culture occidentale peut se réclamer de la Grèce antique et le Ballet est sans conteste né d’un désir de retrouver les racines de la tragédie classique. Encore l’Empire romain était-il aussi convoqué comme origine de la pantomime noble. On pourrait retrouver un autre angle d’approche pour justifier le rattachement au thème de la soirée. Car pour ses rites corybantiques (des célébrations en l’honneur de la déesse castratrice Cybèle), Wheeldon a choisi la Serenade after Plato’s Symposium de Leonard Bernstein, une œuvre « à citations ».

En effet, Bernstein qui fut un compositeur novateur et rempli d’humour pour la comédie musicale (outre le célébrissime West Side Story, on pense à Candide qui fit entrer Voltaire sur la scène de Broadway) se voyait aussi en compositeur sérieux. Et dans ce domaine, hélas, sa muse était un tantinet constipée. Les œuvres symphoniques de Bernstein sont souvent ampoulées voire boursoufflées. Dans sa Sérénade platonicienne, il singe à tout-va les génies de son temps : il y a  un peu d’Hindemith, qui n’a lui-même pas toujours fait dans la dentelle, et beaucoup de Stravinski. Le dernier mouvement, tonitruant avec ses cloches, est embarrassant de grandiloquence.

Suivant jusqu’au bout son choix musical contestable, Christopher Wheeldon fabrique lui aussi une œuvre à citations. Il y a un soupçon d’Ashton dans les coquets costumes années 30 à harnais d’Erdan Morahoglu (on pense à Variations symphoniques mais pourquoi pas aussi La Chatte de Balanchine), une bonne dose de Robbins (celui d’Antique Epigraphs) dans le deuxième mouvement et beaucoup des Quatre Tempéraments de Balanchine (le dernier mouvement avec sa danseuse colérique qui évolue énergiquement au milieu de l’ensemble du corps de ballet et des solistes).

Ce jeu de collage lasse. Le ballet ne dure pourtant qu’une petite demi-heure… qui paraît une éternité.

Dans le Premier mouvement (lent) 2 garçons s’imbriquent l’un dans l’autre. Des positions bizarres, promenades-accroupissement sur demi-pointes, jambes en développés en dedans sont censés intriguer. Arrivent ensuite les filles. Bleuenn Battistoni  (le 18 octobre et le 6 novembre) montre ses belles lignes par des poses coquettes, très Art Déco, qu’on ne pardonne pas habituellement au style Lifar qui a le mérite, au moins, d’être d’époque. Le 7 novembre, Camille Bon, danseuse plutôt dans la veine sérieuse, force sa nature et rend le passage d’autant plus affecté.

Le deuxième mouvement commence par un solo pour une ballerine. Hohyun Kang tire ce qu’elle peut de ses précieux enchaînements qui la conduisent parfois au sol. Dans ce passage-citation d’Antique Epigraphs, c’est pourtant Claire Teisseyre qui retient notre attention le 7. Lorsqu’elle casse sa ligne très pure par des flexes des pieds ou des poignets, elle évoque presque une muse d’Apollon musagète de Balanchine. On reste néanmoins dans la citation.

Inès McIntosh et Jack Gasztowtt (les trois soirs) bénéficient ensuite d’un duo dynamique avec moult portés acrobatiques, y compris le dernier où la danseuse semble jetée dans la coulisse en double tour en l’air par son partenaire. Reconnaissons à ce mouvement le bénéfice de l’efficacité.

On ne peut en dire autant de l’adagio qui propose trois duos concomitants pour les solistes des mouvements précédents (deux femmes, deux hommes, un couple mixte) sans pour autant proposer de contrepoint par une énergie spécifique qu’ils déploieraient. Le décor arty, les lumières rasantes léchées nous bercent au point de nous faire piquer du nez.

Dans le dernier mouvement, néo-colérique, c’est Nine Seropian, par son alliance de pureté classique et d’énergie moderne qui nous convainc plus que Roxane Stojanov qui rend l’ensemble un peu trop fruité et minaudant.

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La critique peut paraître sévère. Christopher Wheeldon est assurément un chorégraphe chevronné. Aurais-je apprécié ce Corybantic Games si j’en étais aux prémices de  ma balletomanie ? Sans doute. La salle qui répond avec enthousiasme lors du baisser de rideau n’a pas à avoir honte de son plaisir. Simplement, on se dit qu’une fois encore, on se retrouve à ressasser des formules depuis longtemps éculées.

Faut-il pour autant abandonner la création néoclassique ? Certes pas. Balanchine lui-même, qui se voyait comme un cuisinier, disait qu’inspiré ou pas il fallait donner à manger à ses danseurs.  José Martinez a donc raison de continuer à commander des ballets contemporains pour justifier la continuation du difficile apprentissage des pointes. Peut-être qu’un jour ces racines de satin, de cuir et de carton feront éclore une fleur véritablement étrange et nouvelle comme à la fin des années 80 lorsque William Forsythe arriva pour sortir le ballet de son bégaiement post-balanchinien.

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La Belle au bois dormant à l’Opéra : la deuxième moisson

La Belle au bois dormant (Tchaïkovski / Noureev d’après Petipa), Ballet de l’Opéra de Paris. Représentations des 27 juin, 6 juillet matinée et 7 juillet.

La deuxième série de la Belle au bois dormant s’est achevée à l’Opéra un 14 juillet en matinée.

Par précaution, on n’a pu s’empêcher d’y retourner quelquefois. En effet, quand auront-nous l’occasion de revoir ce monument de la danse classique interprété par les danseurs de la première compagnie nationale ? La dernière reprise datait de 2014 et la perspective de la fermeture de l’Opéra Bastille en 2030 pour au moins deux ans semble reporter aux calendes grecques une éventuelle reprogrammation.

C’est que La Belle, dans sa version Enzo Frigerio, avec son décor de palais en trois dimensions, n’est pas exactement une production aisément déplaçable. Tout est possible en principe. Mais elle est sans doute coûteuse à adapter sur la scène d’un autre théâtre.

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Parlant de production, il faut bien reconnaître que l’inconvénient de la multiple revoyure est de vous faire focaliser sur ses défauts.

On a par exemple fini par s’agacer de l’entrée du majordome Catalabutte avec ses six porteurs de chandeliers. Que font ces serviteurs à rentrer par une porte côté Cour pour grimper sur une estrade avec des marches en fer à cheval, la redescendre à Jardin et finir leur parcours en plein centre de la scène ? Il y avait assurément un chemin plus court… Dans la production actuelle, on se demande parfois si les dessins séduisants de Frigerio, avec notamment ses deux imposantes portes surmontées de divinités en imposte, n’ont pas été approuvés avant même de se demander si elles s’accordaient avec la mise en scène de Noureev.

Costume pour les fées du Prologue. Nicholas Georgiadis, 1989.

La production d’origine de 1989, celle de Nicholas Georgiadis voulue par Noureev, avait certes ses faiblesses. Dans une ambiance noir et or, très sombre, elle dépeignait une cour du roi Florestan XIV encore sous l’influence de l’Espagne des Habsbourgs. Les danseurs ne portaient pas de fraises au cou mais celles-ci semblaient avoir migré sur les basques des tutus des fées. Ils étaient en conséquence fort lourds. Mais il y avait une cohérence –on ne distinguait au début que les flammes des bougies des domestiques et lorsqu’ils avançaient, ils semblaient lentement illuminer la pièce-.  Et surtout il y avait un sens de la magie baroque.

Durant le prologue, l’arrivée de la fée Lilas était annoncée par le vol dans les cintres d’une créature drapée qu’on aurait pu croire échappée du plafond en trompe l’œil d’une église romaine. Dans la production actuelle, la fée entre par la porte comme n’importe quel quidam. Le jeu des trappes pour Carabosse, qui se faisait majoritairement à vue, est aujourd’hui caché par le groupe des figurants. Quel intérêt alors de l’utiliser si ses sbires s’échappent, eux, en courant vers les coulisses ? De même, l’apparition d’Aurore sur une estrade au moment de la pantomime de malédiction est tellement excentrée que je ne l’ai remarquée que lors de cette deuxième série. A l’origine, il avait lieu  au centre de la scène par la trappe dévolue à Carabosse et était beaucoup plus visible.

Et que dire enfin de ces chiches grilles dorées qui descendent paresseusement des hauteurs pour signifier l’endormissement du palais à la place des mouvantes frondaisons de la production d’origine?

Le plus dommageable reste néanmoins le début du troisième acte. Celui de la production actuelle offre un spectaculaire lever de rideau. Invariablement la salle éclate en applaudissements devant les jaunes et orangées des costumes féminins, les bleus Nattier des redingotes fin XVIIIe des hommes (Franca Squarciapino) sous l’éclat des multiples lustres de cristal. Et puis les danseurs commencent à bouger et le soufflé retombe.

Costumes de Georgiadis pour la reine et le roi, 1er acte.

Lorsqu’il commence à se mouvoir, le roi Florestan exécute une pantomime digne du télégraphe de Chappe. Puis les hommes se retrouvent à faire des marches bizarres en parallèle ou sur les genoux. A la fin de cette sarabande, les applaudissements sont invariablement polis et peu en accords avec ceux du début. Dans la production Georgiadis, le rideau se levait sur le couple royal et sa cour dans de lourds costumes évoquant le Grand Carrousel de 1661. Le roi, affublé d’une imposante coiffe de plumes rouges, portait, comme le reste de ses courtisans masculins, de longs et lourds tonnelets de brocard qui cachaient le haut des jambes et gommaient ainsi, tout en la justifiant, l’angularité de la chorégraphie. La pantomime d’ouverture s’expliquait par les longues manches de dentelle que portaient le roi et sa cour. Ainsi, sur ce passage musical déplacé de la fin du troisième acte au début, Noureev, grand amateur de danse baroque qui avait fait rentrer Francine Lancelot à l’Opéra, présentait la Vieille Cour du roi Florestan, avant l’arrivée de la Jeune Cour sur la Polonaise. Ceci est totalement perdu dans la production actuelle.

Nicholas Georgiadis. Maquette de décor pour la production de l’acte 2.

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Mais ces réserves n’ont pas pris le pas sur le plaisir général qu’il y a eut à retourner voir le spectacle pour ce second round de représentations. Tout d’abord, et une fois n’est pas coutume, il faut mentionner la direction d’orchestre. Sora Elisabeth Lee fait –enfin- sonner La Belle au bois dormant comme il faut. Dès l’ouverture, il y a du drame et du nerf. Puis on n’est plus tant gêné par le nécessaire ralentissement des tempi originaux dû aux exigences actuelles de la technique des danseurs. Madame Lee regarde les interprètes et sait conduire et suivre tout à la fois. Pour une fois, les ovations accordées par le public à l’orchestre ne m’ont pas paru imméritées et j’ai pu m’y joindre sans arrières pensées.

La Cheffe Sora Elisabeth Lee et 3 Pierres précieuses (Alice Catonnet, Clara Mousseigne et Bianca Scudamore).

L’annonce des distributions sur les grands rôles secondaires n’avait rien de particulièrement excitant. Beaucoup d’artistes de la première série reprenaient leurs places dans la seconde. On a néanmoins pu découvrir quelques fées, oiseaux et greffiers nouveaux.

La Brésilienne Luciana Sagioro montre une autorité sans raideur dans la variation aux doigts du prologue (le 6 juillet) et cisèle son diamant qui frémit des pointes et des mains (le 7 juillet). Claire Teisseyre est une Candide aux jolis bras veloutés (le 7). Chez les garçons,  « l’Or » des Pierres précieuses revient surtout à Andrea Sarri (6 juillet), qui se montre très propre et cisèle ses fouettés en 4e devant après ses doubles tours en l’air (que Jack Gasztowtt, le 27 juin, passe sans vraiment les dominer). Nathan Bisson, le 6 juillet, montre de belles dispositions dans ce même rôle mais est encore un peu tendu. Alice Catonnet comme Marine Ganio sont des diamants scintillants et facettés accompagnés de trios de Pierre précieuses plutôt bien assortis. Ganio se taille également un vrai succès dans Florine de l’Oiseau bleu, semblant commander les applaudissements de la salle avec ses petits moulinets de poignet à la fin de l’adage. En volatile, Francesco Mura ne cesse d’impressionner par son ballon et son énergie (le 27 aux côtés de la parfaite Inès McIntosh) tandis qu’Alexandre Boccara (le 6 juillet, avec Ganio) accomplit une diagonale de brisés de volé immaculée pendant la coda. Théo Gilbert (le 7), peu avantagé par le costume, domine néanmoins sa partition aux côtés de la très cristalline Elisabeth Partington. On remarque cependant que le public se montre de moins en moins sensible à la batterie. La prouesse finale du garçon, qui déchainait habituellement, le public semble désormais passer presque inaperçu. Hors du manège de coupé-jeté, point de salut ?

En revanche et dans un autre registre, le duo des chats obtient à raison les faveurs du public. On y retrouve avec plaisir Eléonore Guérineau aux côtés de Cyril Mitillian (le 27) qui a fait ses adieux lors de la dernière de cette série. Autre chat « sortant », Alexandre Labrot, quadrille dans la compagnie, a fait ses adieux en beauté le 7 juillet. Son duo avec Claire Gandolfi (les 6 et 7) était à la fois primesautier et bouffon.

Alexandre Labrot et Claire Gandolfi (le Chat botté et la Chatte blanche).

On salue l’initiative de la direction de célébrer décemment, avec un bouquet et la présence du Directeur de la Danse, le départ de ses artistes. Outre Labrot et Mitilian en chat, Lucie Fenwick en fée Lilas et Julien Cozette ont également tiré leur révérence publiquement sur cette Belle au bois dormant.

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Mais qu’en est-il des protagonistes principaux ?

Le 27 juin, c’est Léonore Baulac qui inaugure la deuxième série des Belles. Elle met beaucoup de fraîcheur dans son Aurore de l’acte 1. De touts petits tremblements au début de l’adage à la rose rajoutent au charme de la débutante qu’est Aurore. Cette partie est néanmoins bien maîtrisée avec une équipe de partenaires de premier ordre. La variation a de jolis équilibres arabesque. La coda, quant à elle, est bien parcourue. Au moment de la piqure d’aiguille, Lé-Aurore  tient ses yeux fixes et presque exorbités. Son manège de piqués est très preste et parcouru. La terreur face à Carabosse est palpable.

Marc Moreau et Léonore Baulac (27 juin).

A l’acte 2, Marc Moreau parvient à transcender son côté danseur pressé pour dépeindre la fièvre amoureuse. C’est un prince qui cherche et veut trouver. Dans sa première variation «  de la chasse », le bas de jambe est particulièrement ciselé : ce prince est le produit d’une éducation soignée. La variation lente à cette qualité de monologue intérieur qui manquait à beaucoup de princes lors de la première série en mars. Les changements de direction sont comme autant de tergiversations. L’arabesque n’est pas nécessairement haut placée mais la ligne générale du danseur dépeint parfaitement l’aspiration.

Léonore Baulac est une vision très éveillée dotée d’une volonté de séduire. Elle évoque la naïade tentatrice, rôle secondaire magistralement créée par Taglioni dans la Belle au bois dormant d’Aumer qui a sans doute inspiré l’ensemble de son tableau à Petipa en 1890. La plénitude du mouvement exprime à merveille les  joies de la séduction au milieu d’un corps de ballet à la fois discipliné et moelleux.

Léonore Baulac et Marc Moreau (Aurore et Désiré).

A l’acte 3, Baulac et Moreau nous présentent un bel adage parfaitement dessiné. Les poses et les portés poissons sont bien mis en exergue et en valeur. Moreau accomplit sa variation sur le mode héroïque (son manège est très dynamique). Elle, très féminine, fait désormais preuve de sérénité et de maturité, offrant par là même une vraie progression psychologique à son personnage. On aura passé une fort belle soirée.

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La Belle au Bois dormant (matinée du 6 juillet).

Le 6 juillet, Hannah O’Neill est une princesse déjà accomplie. Son entrée a de la légèreté et du ressort. L’Adage à la rose est maîtrisé avec des équilibres qui, sans être spectaculaires, sont rendus naturels grâce au suspendu des bras. La variation est très élégante et dominée. La coda de la tarentule commencée très lentement par l’orchestre est ensuite accélérée créant un bel effet dramatique

L’acte 2 commence littéralement noyé par les fumigènes. La chasse semble se passer dans une forêt équatoriale. Quand enfin ils se dissipent, on apprécie les danses évoquant les fêtes galantes de Watteau. Germain Louvet fait une entrée pleine d’aisance et d’élégance, le jaune paille de son costume lui sied à merveille. Sa première variation est fluide et facile. La variation lente est vraiment méditative. On ne se pose pas tellement la question du jeu tant la technique d’école est intégrée et devenue naturelle. Oppositions, fouettés, suspendus des arabesques, tout y est. La variation «Brianza» (ainsi appelée par moi car la créatrice du rôle d’Aurore dansait sur cette musique extraite des Pierres précieuses une variation qui commence par la même combinaison de pas que celle dévolue au prince par Noureev) a ce beau fini même si on soupçonne une petite faiblesse à une cheville.

En vision, O‘Neill joue très souveraine en son royaume. Elle exécute d’amples fouettés d’esquive. Sa variation est maîtrisée même si on aurait aimé voir des piqués arabesque plus soutenus. La tout est amplement compensé par la commande des pirouettes finies en pointé seconde. Lors du réveil, Hannah-Aurore exécute une pantomime de reconnaissance bien accentuée : « Il m’a embrassée et m’a réveillée. Où est-il? » Quand elle coure vers ses parents Germain-Désiré a un moment de doute charmant : « Pourquoi fuit elle ? L’ai-je offensé ? ». Non Germain… Vu la séduction déployée par la damoiselle pendant la scène des naïades, la belle avait amplement consenti à ton baiser de damoiseau…

Hannah O’Neill et Germain Louvet (Aurore et Désiré, le 6 juillet).

A l’acte 3, le couple O’Neill-Louvet se montre désormais très royal : Germain Louvet met beaucoup d’abattage dans sa variation et enthousiasme la salle par ses coupés jetés à 180° très parcourus. Hannah O’neill met l’accent sur la fluidité. Il se dégage de ce couple une aura royale qui console de l’omission par Noureev de l’apothéose « Le bon roi Henri IV ».

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Amandine Albisson (Aurore).

Le 7 juillet, Amandine Albisson prend Aurore presque là où l’a laissé O’Neill. Il y a en effet déjà quelque chose de très mûr et de très régalien dans son Aurore du premier acte. Son entrée énergique et pleine de ballon (à défaut d’un grand parcours) prélude à un adage à la rose très noble. La série des équilibres est bien négociée. La variation est élégante et comme en apesanteur. Au moment de la piqure, Albisson donne, lors de ses piétinés en reculant, l’impression qu’elle voit l’ensemble de la cour lentement s’éloigner d’elle avant de disparaître dans le néant. On quitte l’acte un sur une note pleinement dramatique.

Guillaume Diop (Désiré)

Durant l’acte de la chasse, Guillaume Diop, qui bénéficie d’une salle chauffée à blanc, fait une belle première variation. Ses jetés à 180° sont planés et ses doubles ronds de jambe énergiques. Sa variation lente, qui nous avait déçu par son manque d’incarnation lors de la première série de spectacles, commence plutôt bien. Les beaux pliés et le moelleux sont propices à évoquer la rêverie et le spleen du joli cœur à prendre. Cette scène avait d’ailleurs été bien préparée par le duo formé par le duc et la duchesse d’Artus Raveau et de Sarah Kora Dayanova dans les danses de société. Leur relation subtilement teintée de jalousie et de ressentiment semblait offrir une forme de repoussoir pour le prince aspirant au bonheur. Mais l’atmosphère de la variation s’essouffle en court de chemin. Diop va par exemple regarder dans la troisième coulisse au lieu de tendre vers la porte par laquelle a disparu la fée Lilas. Ses moulinets de poignet qui devraient exprimer l’état d’indécision du jeune homme ne sont ici que des moulinets. On salue néanmoins la réelle progression dramatique de l’interprète sur cette deuxième série.

Amandine Albisson incarne de son côté une vision mousseuse : beaux pliés, variation bien conduite, une forme d’ondoiement sur pointes. Le partenariat entre les deux étoiles est parfaitement réglé. On ressent bien ainsi l’évanescence de l’héroïne face au désir respectueux du prince.

A l’acte 3, le grand pas de deux est d’une grande perfection formelle. La série des pirouettes poisson, la pose finale sont impeccables et font mouche sur le public. Diop est superlatif dans sa variation. Il enthousiasme la salle par son manège final. Tout est ciselé chez Albisson. Et voici donc un couple grand siècle – grand style pour parachever notre saison.

Guillaume Diop et Amandine Albisson (Désiré et Aurore le 7 juillet).

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On aura chéri tous ces instants passé avec le Ballet des ballets en priant ardemment que toutes ces Aurores et ces Désirés auront l’occasion de nous étonner encore dans ces beaux rôles avant que ne sonne l’heure de leur réforme.

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Sylvia à l’Opéra : ce n’est qu’un au revoir?

Sylvia (Delibes, Legris d’après Darsonval-Aveline-Staats-Mérante). Opéra Garnier. Représentation du vendredi 24 mai 2025.

Sae-Eun Park et Pablo Legasa. Saluts.

À la revoyure, qualités et défauts se confirment dans la Sylvia de Manuel Legris. On apprécie toujours la maîtrise savante de la composition du chorégraphe et directeur de compagnie mais on reste nécessairement un peu extérieur à l’action. La faute en revient au livret original écrit à un moment où la danse masculine était au plus bas à l’Opéra. À l’origine, le héros Aminta était interprété par Louis Mérante, le maître de ballet lui-même. Il avait 48 ans. Le rôle d’Orion avait été attribué à un mime italien. Les librettistes ont ainsi confié le déroulement de l’action aux personnages féminins, Sylvia, incarné par la forte technicienne Rita Sangalli, et Eros, joué à l’époque par une femme : le sujet Marie Sanlaville. Dans Sylvia, Aminta, ressuscité par l’Amour, part à la recherche de la nymphe de Diane kidnappée par Orion à la fin de l’acte 1. Il n’arrivera jamais à destination. On le retrouve à l’acte 3 en train de se lamenter. Puis il danse un pas de deux avec l’héroïne qui s’est libérée presque toute seule (l’amour lui a juste prêté son véhicule) et se prend enfin une raclée par son rival Orion. C’est peu court pour un héros traditionnel. (Dans Raymonda, un ballet au livret bancal à l’origine, Jean de Brienne a au moins une scène du rêve pour briller et il gagne sa confrontation face à Abderam). Cela ne fait pas pour autant de Sylvia un ballet féministe puisque la fière héroïne finit quand même par succomber au charme de son tendron dispensable et fadasse.

Nine Seropian et Clara Mousseigne (deux chasseresses).

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La réussite ou non d’une soirée de Sylvia repose donc principalement sur le charme de ses interprètes ainsi que sur leur alchimie. C’est la seule manière de faire passer les inconsistances du livret d’origine si on renonce à la refondre.

Claire Teisseyre et Milo Avêque (Diane et Endymion).

Au soir du 24 avril, cela commence plutôt bien. Claire Teisseyre, à la fois élégante et autoritaire en Diane, jette à 180° et reste en suspension. On croit donc aisément à sa nature divine en dépit de son costume terne et de la peu compréhensible inversion hiérarchique impliquée par la mise en scène – Sylvia, une simple nymphe, apparait sur un praticable en hauteur tandis que Diane, la déesse, la contemple en contrebas sur la scène. Le couple qu’elle forme avec Milo Avêque en Endymion fonctionne bien. Les deux danseurs rendent palpable la prévention initiale de la déesse face aux attentions insistantes de son prétendant, puis le badinage amoureux et enfin la connexion charnelle du couple.

Sylvia. Chun-Wing Lam et Eléonore Guérineau (une faune et une Naïade)

Chun-Wing Lam  et Éléonore Guérineau sont très bien en meneurs des esprits de la forêt. Lam est moins un satyre (qu’interprétait merveilleusement bien Francesco Mura lors de mes deux précédentes représentations) qu’un elfe bondissant. Mais son Puck facétieux contraste à merveille avec la naïade déjà bacchante de Guérineau, son ballon et sa sensualité déliée, très différents de l’interprétation cristalline d’Inès McIntosh.

En Orion, Jeremy-Loup Quer, à défaut de toujours rencontrer parfaitement les prérequis techniques de son rôle, dégage l’énergie farouche et concupiscente du chasseur noir. Lorsqu’il éveille Sylvia dans sa grotte à l’acte 2, on a même l’impression de voir une scène du réveil de La Belle au bois dormant du côté sombre.

Lorenzo Lelli est quant à lui Eros. Il mène plutôt bien sa scène d’Amour médecin et parvient à garder sa dignité intacte dans la croquignolette scène du « regardez mon speedo ! ». Néanmoins, pour s’extasier vraiment, il faudra attendre le feu d’artifice technique de l’acte 3.

Sylvia. Lorenzo Lelli (Eros).

Mais qu’en est-il du couple principal, ciment d’autant plus essentiel que cette histoire est mal fagotée ?

En Aminta, Pablo Legasa, qu’on a regretté de voir si peu distribué ces deux dernières saisons, est d’une grande beauté. Avec sa ligne très étirée et ses développés à la hauteur de celui des danseuses, il évoque l’idéal classique tout en sachant donner aussi des indications dramatiques fortes. Il parvient ainsi, pendant la confrontation avec Diane et les chasseresses, à suggérer qu’il a déjà noué avec Sylvia une relation sentimentale.

Pablo Legasa. Saluts.

Dans le rôle de la nymphe de Diane, Sae Eun Park domine sa partition et se montre musicale. Sa scène de l’escarpolette en compagnie des nymphes a beaucoup de grâce. On est loin de la bonne élève de jadis qui semblait se réciter intérieurement les indications de ses répétiteurs tout en dansant. À l’acte 2, dans la grotte d’Orion, mademoiselle Park fait même de très jolis effets de dos et de bras en bacchante improvisée.  Ce qui manque encore à cette élégante danseuse, c’est de la projection. Il y a par exemple de bonnes intentions dans la scène de l’élégie sur le corps supplicié d’Aminta mais l’interprétation ne passe pas toujours la rampe.

Sae Eun Park (Sylvia).

Ceci n’aide donc pas à se projeter sur le couple Aminta-Sylvia qui n’a que la très courte fenêtre de l’adage à l’acte 3 pour convaincre. Or, Legasa et Park délivrent dans ce passage une exécution immaculée mais sans vraie alchimie de couple.

On passe néanmoins un excellent moment. Le challenge technique de la bacchanale finale est aisément relevé. Sae Eun Park est impeccable dans sa variation ainsi que dans la série de pirouettes en attitude devant. Pablo Legasa et Lorenzo Lelli font assaut de virtuosité et on apprécie le contraste d’école qui les sépare. Lorenzo-Eros a des sauts explosifs et une batterie extrêmement croisée. Les impulsions se voient et font partie de la chorégraphie. Pablo-Aminta est lui un modèle de l’école française. Les impulsions sont gommées et l’élévation semble sortie de nulle part. Le danseur parvient même à exprimer l’invite à sa partenaire pendant les pirouettes développées arabesque de sa variation.

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On ressort satisfait de l’Opéra Garnier, avec en prime la vision du primesautier trio de paysans mené par Hortense Millet-Maurin qui était également une esclave nubienne serpentine à  l’acte 2 aux côtés d’Elizabeth Partington.

Au revoir donc Sylvia et à bientôt – on l’espère, en dépit de nos réserves – où à dans trente ans dans une version qui peut-être enfin sera définitive.

Sylvia, scène finale. Sae Eun Park, Pablo Legasa, Lorenzo Lelli

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