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Liam Scarlett (1986-2021)

Frankenstein - La solitude de la Créature (Steven McRae) - Photo Andrej Uspenski (C) ROH 2016

Frankenstein – La solitude de la Créature (Steven McRae) – Photo Andrej Uspenski (C) ROH 2016

Quels souvenirs laissera Liam Scarlett, chorégraphe britannique disparu vendredi dernier, à l’âge de 35 ans ?

En compulsant mes archives, je m’aperçois que j’ai dû le voir pour la première fois en décembre 2009, dans la danse russe de Nutcracker, qu’il interprétait aux côtés de Tristan Dyer ; en mars 2010, il était de la petite troupe de la danse à la mandoline du Romeo and Juliet de McMillan, aux côtés de Sergei Polunin, Fernando Montaño, Ludovic Ondiviela, Jonathan Watkins et Paul Kay ; en octobre, il figurait, avec Erico Montes, Andrej Uspenski et Dawid Trzensimiech, parmi les soldats en arrière-fond de Winter Dreams, également de McMillan. Et en novembre, il incarnait le maître de ballet – d’une façon très pince-sans-rire – de la Cinderella de Frederick Ashton.

Parmi ses camarades de l’époque, certains ont percé, d’autres non. Lui était déjà sur d’autres rails : depuis 2005, il avait créé, sur de petites scènes annexes où le Royal Ballet teste ses nouveaux talents, une demi-douzaine de pièces. Et il allait bientôt commencer à chorégraphier pour la grande salle, avec Asphodel Meadows (novembre 2010 ; la Prairie d’Asphodèle est l’endroit où, selon la mythologie grecque, séjournent les âmes des morts).

Scarlett était clairement un bébé du Royal Ballet, et certaines de ses créations s’inscrivaient directement dans la lignée de McMillan, avec lequel il partageait une certaine noirceur d’inspiration. Par exemple, Sweet Violets (2012), ballet assez touffu autour du mythe de Jack L’Éventreur, cumulait pas de deux à forte charge érotique et sursaturation narrative (deux traits assez saillants dans Mayerling).  Hansel et Gretel, ballet de chambre créé dans la petite salle en sous-sol du Linbury (2013), conservait la structure du conte de Grimm (Hansel, Gretel, deux parents, une forêt, une sorcière), en extrayait tout le noir subconscient, et le transformait en film d’horreur.

Mais le chorégraphe avait aussi un style propre, dense,  à fleur de peau. Une qualité indissociable de ses choix musicaux. Scarlett aimait le piano, qu’il a mis au centre de ses créations non narratives, avec le double concerto de Poulenc pour Asphodel Meadows, le trio élégiaque de Rachmaninov dans Sweet Violets et le concerto pour piano n°1 de Lowel Lierbermann pour Viscera (2012).

Dans cette dernière pièce – commande d’Edward Villella pour le Miami City Ballet – Scarlett fait fond, une fois encore, sur le lyrisme de l’instrument. La tonalité reste sombre et changeante, comme dans Asphodel Meadows. On songe aussi au Concerto de MacMillan (1966), pour la structure tripartite, les académiques unis et le fond lumineux. Mais Scarlett, exploitant aussi les qualités d’attaque et de vélocité du Miami City Ballet, fait du dernier mouvement un perpetuum mobile digne des finales balanchiniens : un tourbillon énergique dont on n’entrevoit ni ne souhaite l’épuisement.

À Londres, ses créations sont faites sur-mesure pour les interprètes dont il connaît par cœur les points forts : la rapidité du bas de jambe et la flexibilité du haut du corps de Laura Morera, le sens de l’adage de Marianela Nuñez, l’expressivité de Federico Bonelli. Ce dernier est très intense dans The Age of anxiety  (2014, dans le cadre de l’année Bernstein), sorte de Fancy free version gloomy, dont le meilleur moment est une fête alcoolisée où chacun perd le contrôle. Sarah Lamb, en célibataire new-yorkaise tout droit sortie d’un tableau d’Edward Hopper, y était aussi inoubliable.

Dans Frankenstein (2016), le chorégraphe concentre le propos sur la solitude du créateur et l’humanité malheureuse de la créature, mais les scènes pour le corps de ballet frappent par leur aspect conventionnel et répétitif. C’est aussi le point faible – notamment à l’acte I – de sa production de Swan Lake (2018), qui remplace quand même avantageusement celle, usée jusqu’à la corde, d’Anthony Dowell.

Par rapport à d’autres créateurs néoclassiques des années 2010, comme Millepied, Dawson ou Peck, Liam Scarlett fait moins de la complexité des partenariats un  but en soi, et il n’oublie pas de créer une arche narrative dans l’adage. Voyant Hummingbird (2014, San Francisco Ballet), l’ami Cléopold trouvait à la chorégraphie des qualités de « construction, transition et circulation » qu’il peinait à percevoir chez les titulaires de l’école purement américaine du ballet.

Si j’ai aligné tant de noms dans ces souvenirs, c’est que je voudrais qu’ils entourent le mort comme d’un chaud manteau, tenter de conjurer par quelques pauvres mots l’insupportable d’un départ si précoce, et placer l’accent sur les créations plutôt que sur les allégations qui ont fait du chorégraphe un paria aussi vite qu’il était devenu une star du Royal Ballet (à l’inverse de ce qu’ont fait, vite et mal, tous les journaux qui ont simplement repris une dépêche AFP au cours du weekend).

Même si sa famille a souhaité garder secrètes les circonstances de la mort du chorégraphe, elle intervient tout juste après que le ballet du Danemark a annoncé la déprogrammation de son Frankenstein, initialement prévu pour 2022, en raison d’allégations d’inconduite envers son personnel entre 2018 et 2019, et on ne peut s’empêcher de supposer que Liam Scarlett l’a reçue comme une condamnation sans appel.

Dans le ballet Frankenstein, justement, une scène montrait un comportement de meute à l’égard d’un des personnages. Et c’était aussi glaçant que l’attitude d’institutions qui se dédouanent aujourd’hui, dans une logique de bouc-émissaire, de n’avoir rien vu hier.

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Mayerling : Rudolf, les femmes et l’Histoire

P1000939Tout est déliquescent au royaume de Franz Josef. L’héritier du trône a la syphilis, il est morphinomane et obsédé par les armes à feu. Il est entouré par un quatuor de femmes qui pourraient incarner chacune un  vice dans une bolge de l’enfer de Dante : Égocentrisme (L’impératrice Élisabeth), Avidité (Marie Larisch, ancienne maîtresse devenue entremetteuse), Impudeur (l’actrice Mitzi Caspar, maitresse en cour) et Jalousie (sa femme, la médiocre princesse Stéphanie). Comme si cela ne suffisait pas, une cinquième femme va rentrer en lice. Elle est d’apparence plus ingénue mais est sans doute la pire de toutes les hydres qui entourent un prince affligé, par surcroît, de soucis politiques.

Un sujet aussi complexe était fait pour exciter la muse de Kenneth MacMillan. Fort du  succès de Manon, gagné au forceps, le grand Kenneth décida de réitérer dans le domaine scabreux en réunissant, à peu de choses près, la même équipe.

Pour suggérer un monde étincelant mais vidé de substance, personne n’était en effet plus indiqué que Nicholas Georgiadis. Les ors chatoient donc dans cette production, à l’instar de cette monumentale tapisserie de brocard aux armes de la double monarchie pendue sur le devant de scène au début du ballet. Mais les tentures et les oripeaux emplumés cachent souvent des mannequins sans vie (les gardes impériaux des noces du prince Rudolf ou les robes de l’impératrice Élisabeth suspendues, fantomatiques, dans sa chambre).

John Lanchbery, le ré-orchestrateur des pages de Massenet pour Manon, a choisi, assez logiquement, des pages de l’austro-hongrois Ferencz Liszt pour évoquer l’empire des Habsbourg au tournant du siècle. Mais la logique ne crée pas nécessairement le miracle du chef-d’œuvre. La partition de Manon est certes contestable du point de vue de l’orchestration, mais elle a une identité propre. Celle de Mayerling est juste fonctionnelle.

Comme dans Manon, la chorégraphie de MacMillan est strictement narrative. Si John Neumeier s’était attaqué à ce sujet, il aurait certainement intercalé des moments de danse abstraite pour évoquer la psychologie des personnages ou donner du sens à leurs gestes. Avec MacMillan, les atermoiements des protagonistes du drame découlent des faits. Et dans ce marasme qui conduit au drame de Mayerling, des faits, il y en a beaucoup. Trop peut-être. Manon, adaptation d’une œuvre littéraire avait été retaillée spécialement pour le ballet. Dans Mayerling, aucun tenant ni aucun aboutissant n’est négligé. Du coup, la soirée dure plus de trois heures, au risque de nous perdre en chemin. Personnellement, la scène de tirage des cartes entre Maria Vetsera, sa mère et la comtesse Larisch, au milieu de l’acte II, m’a semblé superflue, surtout entrelardée entre une scène de taverne louche (dans la veine de la scène chez Madame de Manon) et un feu d’artifice impérial où le héros découvre que sa mère est adultère. Et quand arrive la première véritable rencontre entre Rudolf et Maria Vetsera – celle où la jeune fille menace l’héritier de la Couronne d’un revolver – notre attention est quelque peu érodée.

C’est dommage, car MacMillan n’est jamais autant à son affaire que dans les pas de deux. Et, vu la multiplication des personnages féminins, ceux-ci sont aussi divers que nombreux pour Edward Watson, le prince Rudolf profondément malade et tourmenté de ce soir de première. Longiligne, presque efflanqué dans ses uniformes de parade, Ed. Watson promène en effet son malaise (et également, pour notre plus franc bonheur, ses lignes étirées jusqu’à l’abstraction) de partenaire en partenaire, développant à chaque fois une variation sur le thème de « l’inadéquation » par le pas de deux. Avec la comtesse Larisch incarnée par Sarah Lamb, vipère au teint d’albâtre , c’est le refroidissement des passions. La trame des pas de deux pourrait être assez classique mais la partenaire est toujours tenue à distance. Les brefs rapprochements ne se font qu’en renâclant. Avec sa mère, l’impératrice Élisabeth (Zenaida Yanowsky, subtil mélange de hauteur et de fragilité), Ed-Rudolf courbe sa colonne vertébrale comme le ferait un chat à la recherche d’une caresse ; mais c’est pour buter sur un corps aussi dur et froid qu’une cuirasse. Avec Mitzi Caspar (Laura Morera, qui danse clair et cru) il est relégué au rang d’utilité – un commentaire sur son statut d’amant payant ou sur son impotence ? Les principaux partenaires de la donzelle sont les quatre nobles hongrois censés évoquer les soucis politiques du prince (le plus souvent ils ont plutôt l’air de polichinelles montés sur ressort qui font irruption de derrière des tentures). Ryoichi Hirano, Valeri Hristov, Johannes Stepanek et Andrej Uspenski démontrent-là leur science du partnering dans un pas de cinq qui n’est pas sans évoquer le jeu de la grande soliste et des quatre garçons dans Rubies de Balanchine.

Mais les moments les plus forts sont ceux que Rudolf passe avec les deux opposés dans le spectre de ses relations féminines. Avec la princesse Stéphanie (Emma Maguire, qui laisse affleurer l’orgueil sous l’oie blanche diaphane), son épouse abhorrée, il semble former un monstre à plusieurs têtes. Edward Watson, les linéaments du visage déformés par la haine, écartèle la jeune épousée, la prend en charge comme un paquet de linge sale. Dans un effort surhumain pour se conformer à ce qui est attendu d’elle, la jeune mariée s’élance sur son époux mais elle atterrit lamentablement sur son dos puis entre ses jambes. C’est la puissante peinture d’une relation dévoyée. Avec Maria Vetsera, la parèdre de Rudolf dans la folie, les pas de deux mettent en harmonie les lignes sans pour autant dégager une impression de plénitude. Mara Galeazzi dépeint Maria Vetsera sous forme d’un petit animal pervers face à un Rudolf désormais hors de tout contrôle, dont elle ne mesure pas la dangerosité…

Resserré sur cette relation maladive de Rudolf avec les femmes, Mayerling eût pu être un chef-d’œuvre. Mais à trop vouloir montrer, le chorégraphe a un peu noyé les principaux protagonistes dans un océan de personnages secondaires. C’est ainsi qu’en dépit d’une partition dansée conséquente, Bratfisch, le cocher confident du prince, reste à l’état d’esquisse. Ricardo Cervera a beau mettre toute sa légèreté et son esprit dans les deux variations bravaches qui lui sont attribuées,  ouvrir et refermer le ballet, sa présence reste néanmoins accessoire à l’action.

 Tel qu’il se présente aujourd’hui, avec toutes ses notes de bas de page, Mayerling ressemble à un cousin boursouflé de Manon.

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Prince of the Pagodas : Cuisse de nymphe émue et gratte-cul

The Prince of the Pagodas. Ballet en trois actes. Chorégraphie de Kenneth MacMillan, musique de Benjamin Britten, décors de Nicholas Georgiadis, livret de Colin Thubron d’après John Cranko, lumières de John B. Read. Représentation du 30 juin, avec Sarah Lamb (Rose), Frederico Bonelli (le Prince), Itziar Mendizabal (Épine), Gary Avis (l’Empereur), Valentino Zucchetti (le Fou), MM. Uspenski, Stepanek, Watkins et Maloney (les quatre Rois). Orchestre du Royal Opera House dirigé par Barry Wordsworth.

Dans le Prince des Pagodes, l’héroïne porte un nom tout simple ; elle est la princesse Rose. Telle la fleur du même nom, elle est la cadette et la préférée de tous, au grand dam de son aînée, l’églantine, plus connue sous le nom de gratte-cul en raison de ses nombreuses épines (le prénom de la méchante sœur dans le ballet de Benjamin Britten). Le père de ces deux donzelles, en jardinier avisé mais fatigué, partage très peu équitablement son royaume entre ses deux filles à l’avantage de Rose. Pour se venger, Épine, qui n’est pas gratte-cul pour rien, transforme le fiancé de sa demi-sœur en un repoussant lézard, arpenteur infatigable des terres desséchées et apporte enfin le chaos dans le jardin bien ordonné de son papa (les courtisans sont transformés en babouins). Aidé d’un fou du roi, un peu abeille mellifère, Rose devra apprendre à braver les quatre vents (des prétendants venus des quatre points cardinaux avec leurs quelques attraits et leurs nombreux défauts) avant de dompter son aversion pour son reptile d’amoureux et repousser, comme il se doit, la mauvaise herbe qu’est sa sœur loin du bosquet impérial ordonné.

L’autre soir, la princesse Rose était interprétée par Sarah Lamb, une danseuse tout indiquée pour donner une substance et un parfum de rose à une héroïne de ballet. Son interprétation m’a parue tellement évocatrice que j’ai même trouvé le nom et le parfum du rosier qui lui convenait le mieux : elle est un « Cuisse de nymphe émue », un rosier arbustif ancien connu avant 1789. Il a des tiges assez longues et souples et nécessite un tuteurage. Ainsi, au premier acte, La Rose de Sarah Lamb paraît-elle bien faible face aux virulents assauts de sa sœur Épine (Itziar Mendizabal, très à l’aise dans une chorégraphie volontairement redondante à base de jetés déclinés à toutes les sauces). Son vocabulaire personnel, à base de piqués arabesque, d’équilibres et de ports de bras variés dégage une grande délicatesse mais aussi un certain manque d’affirmation. Sarah Lamb a un beau et long pied cambré qui évoque la fragilité tant il semble alors supporter son corps de manière instable. Certes, ni le corps ni le pied ne tremblent, mais c’est comme si on voyait le point de greffe entre les deux. On est donc rassuré de voir ce fragile et précieux végétal tuteuré pour son épreuve initiatique du second acte par un Valentino Zuchetti en bouffon, la fraise au vent, sautant et tournant tous azimuts avec sa perruque élisabéthaine rouge et crépue. Même si le tout manque un peu de profondeur, c’est roboratif.

À l’acte II (The Other Land), partie la plus éditée pour cette reprise, puisqu’une quinzaine de minutes de l’œuvre originale ont été coupées, Rose rencontre à nouveau les prétendants qui l’avaient courtisée, aussi bien que sa sœur, au premier acte : Le prince du Nord, son costume de pirate, ses gants rouges et son incroyable rudesse (Andrej Uspenski, plus à l’aise dans cette partie que dans les rapides enchaînements saltatoires de sa variation du premier acte), le narcissique prince de l’Est, sa chemise de soie multicolores et ses miroirs (Johannes Stepanek qui possède un art du plié dans le fouetté arabesque à en faire pâlir plus d’un), le prince de l’Ouest, sorte de parodie du duc d’Alençon venu demander la main de la reine vierge (Jonathan Watkins, irrésistible dans sa variation pastiche des danses de cours élisabéthaines puis assez glaçant, grimé en joker) et le aussi sensuel que cruel Prince du Sud (Brian Maloney, qui tire plus la chorégraphie vers le tribal là où son devancier et créateur du rôle, Ashley Page, mettait l’accent sur les décentrés contemporains de la chorégraphie). Dans cette dernière rencontre, où le cauchemar atteint son comble puisque le Prince bat Rose dans un ralenti cinématographique, Sarah Lamb commence à montrer une autre facette de son personnage. Dans son pas de deux avec son tortionnaire, ses lignes se tendent comme la corde d’un arc au point de sembler s’étirer au-delà des lignes physiques du corps de la danseuse. Elle poursuit cette transformation au second tableau par des cambrés qui sont comme des frémissements lorsque son fiancé la touche alors qu’elle a les yeux bandés. Le fragile arbuste prend de l’assurance. N’est-ce pas souvent dans les terres les plus improbables que les rosiers prospèrent finalement?

L’objet principal du voyage initiatique de la princesse Rose, c’est le sauvetage de son fiancé, « Le » Prince (c’est le seul nom qu’on lui connaît). Federico Bonelli s’est lancé dans ce rôle avec passion et fougue. Son Lézard, avec une chorégraphie qui alterne les enchaînements au sol et des jetés développés athlétiques, est très réussi. Il parvient même, malgré un casque qui lui couvre les deux-tiers du visage, à nous faire comprendre son désespoir par la courbure crispée de son dos. C’est également un partenaire précis qui laisse de l’espace à sa ballerine pour s’exprimer. Dans le grand pas de deux du troisième acte, Sarah Lamb peut alors déployer sa danse dans toute sa plénitude. Telle le « cuisse de nymphe » qui arbore un soupçon de rouge à l’extrémité de son bourgeon puis devient d’un rose presque blanc, elle émane une lumière nacrée dans son nouveau costume pailleté. Sa chorégraphie n’est pas sans évoquer la variation du troisième acte de La Belle au bois dormant. Ses pieds semblent désormais entrer dans le mouvement d’une manière beaucoup plus harmonieuse avec le reste du corps, et quelle variété des ports de bras! De son côté, Bonelli semble avoir décidé de tout donner pour son grand pas. Il donne donc généreusement et peut-être même un peu trop. La fougue ne triomphe pas toujours quand elle marche sur les plates-bandes de la correction du travail.

The Prince of the Pagodas - Photo Bill Cooper - Courtesy of ROH

The Prince of the Pagodas – Photo Bill Cooper – Courtesy of ROH

On passe somme toute un excellent moment avec ce Prince of the Pagodas. La musique de Britten et son alternance de pastiches des musiques de cour du XVIe siècle et d’accents exotiques du gamelan comporte plus d’une jolie page. Les coupures ont judicieusement allégé l’acte du rêve même si on regrette que la princesse Épine en soit désormais bannie.

Le sauvetage du ballet est-il néanmoins assuré ? On ne peut encore le dire avec une totale certitude. Comme dans La Belle au Bois dormant, les personnages du Prince des Pagodes sont plus des symboles que des individualités. On suit l’histoire sans déplaisir, on apprécie les qualités de la chorégraphie et la façon dont les danseurs l’interprètent mais on ne se laisse pas nécessairement émouvoir. De plus, la plupart des ballets d’action de MacMillan nécessitent un temps d’assimilation avant qu’ils ne s’infusent dans les danseurs. La chorégraphie a été très bien répétée par le Royal Ballet, mais il faudra sans doute au moins deux reprises avant que la compagnie semble tout à fait à son aise dans la riche scénographie de Georgiadis. Telle la princesse Rose au début du ballet, l’œuvre a encore un petit air transplanté. La greffe prendra-t-elle ? Selon Dame Monica, c’était un peu l’opération de la dernière chance. On peut nourrir quelques espoirs.

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